|
Né à Saint-Constant le 8 février, Joseph-Narcisse Cardinal est le deuxième des huit enfants de Joseph Cardinal et de Marguerite Cardinal. Appartenant à une honnête famille aisée de Saint-Constant, dans le comté de Laprairie, en 1817, son père fait du commerce à Montréal. La même année, il inscrit son fils Joseph-Narcisse Cardinal au petit séminaire de Montréal. À sa sortie en 1822, Joseph-Narcisse Cardinal retourne chez son père, maintenant établit comme cultivateur à Châteauguay. C'est dans ce village, que Joseph-Narcisse Cardinal entreprend son stage de clerc en 1823, sous la direction du notaire François-George Lepailleur. Âgé alors de 21 ans, il se fixe à Châteauguay où il commence à exercer sa profession. Son talent et son honnêteté lui permettent bientôt de se faire une belle clientèle et de s'occuper des affaires de sa paroisse ( DE LORIMIER, 1988 : 160 ). Entre 1829 et 1832, Cardinal se retrouve syndic de l'école avec le curé Pierre Grenier et Lepailleur. En novembre 1831, il agit à titre de secrétaire lors d'une assemblée de notables, au cours de laquelle on rédige une requête à l'archevêque de Québec Mgr Panet, pour demander l'autorisation de procéder àdes réparations sur l'église. À cette époque, Joseph-Narcisse Cardinal a des démêlés avec le curé Grenier, puis avec son successeur, Jean-Baptiste Labelle.Prenant une part active à la politique dès sa majorité, il est plausible que Cardinal se soit mêlé de la campagne électorale de Jean-Moïse Raymond en 1830, candidat du parti patriote ( DE LORIMIER, 1988 : 161 ). Le 31 mai de l'année suivante, Joseph-Narcisse Cardinal épouse à Montréal, Eugénie Saint-Germain, fille de Bernard Saint-Germain, interprète au département des Affaires indiennes. Par ce mariage, Cardinal consolide sa position au sein de la petite bourgeoisie canadienne de la région de Laprairie. En 1833, Cardinal est nommé adjudant-lieutenant, puis capitaine dans le deuxième bataillon de milice du comté de Laprairie. En 1834, lors d'une assemblée du comté de Laprairie à Saint-Constant, Cardinal approuve les Quatre-vingt-douze Résolutions. On pense donc à lui pour se présenter aux élections de l'automne contre Cuvillier, critiqué pour ses positions trop modérées. Au début de novembre 1834, aux côtés de Louis-Joseph Papineau, Denis-Benjamin Viger et Louis-Hippolyte La Fontaine, Cardinal et plusieurs autres patriotes se réunissent à Montréal, à la librairie d'Édouard-Raymond Fabre, où ils appuient la mise sur pied d'un comité constitutionnel ( DE LORIMIER, 1988 : 161 ). Aux élections générales de 1834, Joseph-Narcisse Cardinal est élu sans opposition député de la circonscription de Laprairie. À la chambre d'assemblée, Cardinal ne se fait pas remarquer, mais se range toujours du côté des partisans de Papineau. Très intéressé par les problèmes d'ordre scolaire, il fait partie en 1835 du comité permanent sur l'éducation et les écoles. À l'automne 1836 et à l'été 1837, Cardinal figure parmi les députés qui refusent de voter les subsides que demande alors le gouverneur lord Gosford. Le 6 août 1837, il prononce un discours anticoercitive du comté de Laprairie, à Saint-Constant. Après la dissolution de la chambre d'assemblée, le 26 août 1837, Joseph-Narcisse Cardinal retourne pratiquer le notariat à Châteauguay. Avant la fin de l'été, il renvoie sa commission de capitaine de milice pour protester contre la destitution de nombreux patriotes de leurs charges de magistrats et d'officiers de milice ( DE LORIMIER, 1988 : 161 ). C'est sa présence à la tête de la délégation de l'assemblée des six comtés, à Saint-Charles-Sur-Richelieu le 23 octobre, qui le consacre comme l'un des chefs patriotes du comté de Laprairie ( DE LORIMIER, 1988 : 162 ). Il s'abstient cependant de participer à l'insurrection de 1837, mais il ne fait pas mystère de ses sympathies. Les bureaucrates menacent même de le dénoncer aux autorités. Devant les instances de sa femme et de ses amis, Cardinal se réfugie aux États-Unis, où il rencontre Robert Nelson. Il s'engage alors dans la préparation d'une nouvelle insurrection. De retour au Bas-Canada en février ou mars 1838 ( DE LORIMIER, 1988 : 162 ), Cardinal se remet clandestinement à pratiquer à Châteauguay. Plus tard au printemps, il adhère à l'Association des Frères chasseurs. Il va alors convertir sa maison en une loge de chasseurs. L'ardeur de Cardinal incite Nelson à en faire l'un de ses principaux adjoints à la mi-juillet. Il est alors chargé d'organiser le soulèvement dans le comté de Laprairie. Dans la nuit du 3 au 4 1838, alors que le seconde insurrection éclate, Cardinal procède à l'arrestation des principaux bureaucrate de Châteauguay ( DE LORIMIER, 1988 : 162 ). Par la suite, accompagné, entre autres, de Joseph Duquet et de son beau-frère François-Maurice Lepailleur, il se rend à Caughnawaga (Kahnawake) pour y prendre des armes et des munitions aux indiens. Prévenus de la présence des patriotes, ces derniers les invitent à entrer dans la réserve et les encerclent. Cardinal et ses partisans sont conduits à la prison de Montréal par les indiens. La maison de Cardinal est ensuite incendiée par des volontaires. Le 28 novembre 1838, Cardinal et onze compagnons sont traduits devant le conseil de guerre, dont fait partie sir John Colborne ( DE LORIMIER, 1988 : 162 ). Cardinal dépose par la suite un protêt qui conteste la compétence du tribunal et demande un procès par jury. On rejette cette objection. Le procès débute et Cardinal procède lui-même à des contre-interrogatoires. Il sollicitera également un délaie de trois jours pour permettre aux accusés de préparer leur défense; ce que le tribunal accepte. Le 8 décembre 1838, le conseil de guerre trouve tous les accusés coupables de haute-trahison, à l'exception de deux qui sont acquittés. Quatre des accusés, dont Cardinal, sont condamnés à mort, considérés comme les chefs rebelles de Châteauguay. Cette sentence n'étant pas conforme aux dispositions, Colborne demande au conseil de guerre de réviser son jugement. Le 14 décembre, le tribunal condamne tous les accusés à mort. Dès que la décision est connue, la femme de Cardinal écrit à lady Colborne pour la supplier d'intercéder en faveur de son mari ; Colborne demeure inflexible. Le matin du 21 décembre 1838, Joseph-Narcisse Cardinal est pendu aux côtés de Joseph Duquet. Pour respecter un de ses vœux exprimé avant son exécution, on aurait placé son corps dans un cercueil couvert du drap funéraire des victimes de l'émeute du 21 mai 1832 ( DE LORIMIER, 1988 : 163 ). Cardinal est ensuite enterré dans une fosse avec Duquet dans l'ancien cimetière catholique de Montréal, site actuel du square Dominion. En 1858, François- Maurice Lepailleur s'occupe de transporter ses restes au cimetière Notre-Dame-des-Neiges, où il repose sous le monument élevé à la mémoire des patriotes. " L'histoire se souvient de Joseph-Narcisse Cardinal comme du premier martyr de la cause de l'indépendance du Bas-Canada " ( DE LORIMIER, 1988 : 163 ). Isabelle Lecavalier
| |