|
|
Dès 1838, les députés du Haut-Canada propose une loi visant à dédommager les loyales victimes de l`insurrection dans cette province. Une législation similaire est également adoptée par le Conseil spécial du Bas-Canada. Mais, cette loi est insuffisante dans la mesure où elle ignore les dommages causés par les autorités ou par les volontaires ayant combattu pour la Couronne (Chapais, 1933: 88). Elle ne prend en considération que les actes de vandalisme commis par les rebelles. Suite à l`union des deux Canadas en 1840, on vote une loi visant à abolir cette injustice, mais cette mesure ne s`applique que pour le Haut-Canada. En 1845, alors que les conservateurs sont au pouvoir, une requête est faite pour adapter cette loi également dans le Bas-Canada. Évidemment, cette mesure ne touche que les sujets loyaux. Les commissaires, chargés de percevoir les réclamations, demandent des précisions quant à l`éligibilité des personnes. En d`autres termes, comment définir un loyaliste ? Il se font répondre qu`il s`agit d`une personne n`ayant reçue aucune sentence devant les tribunaux (Chapais, 1933: 89). Ainsi, une personne peut avoir participé aux troubles, mais si elle n`est pas accusée, recevoir tout de même un dédommagement. En avril 1846, les commissaires présentent leur rapport stipulant qu`une somme de 100 000 louis selon Chapais ou 400 000 dollars pour Filteau ou encore 100 000 livres pour David pourrait être suffisante pour dédommager les Loyaux du Bas-Canada. Le gouvernement conservateur, malgré qu`il a en sa possession les recommandations d`une commission mandaté par lui, ne prend aucune décision et laisse la situation en suspens. Il a probablement conscience du potentiel explosif de ce projet de loi. Il faut attendre le gouvernement formé par Louis-Hippolyte La Fontaine et Robert Baldwin en 1849 pour qu`un débat à la Chambre ait lieu.Le 13 février 1849, le débat s`engage donc sur cette question. Selon Chapais, David et Filteau, il s`agit du débat ayant soulevé le plus de passions dans les annales du parlementarisme canadien. Les protagonistes durant les troubles de 1837-1838 sont de nouveau face à face mais, au lieu d`être confronté sur un champ de bataille, ils le sont dans un Parlement. Le verbe fait place à l`épée. Les adversaires sont identiques: d`un côté Papineau, La Fontaine, Nelson, Morin et, de l`autre, Molson, Moffat, Gugy. En quelque sorte, le débat est inutile, les adversaires ont déjà leurs opinions et la discussion ne sert qu`à régler de vieux comptes. Après plusieurs jours de discussions et d`invectives, la loi est votée avec une majorité de vingt-cinq voix. Lorsque le gouverneur général Elgin se rend à la Chambre le 25 avril pour sanctionner la loi, il est injurié, hué et reçoit également des menaces de mort. Le soir, les émeutiers se rendent au Parlement, font fuir les députés en leur lançant des pierres et mettent finalement le feu au Parlement. Ni Elgin ni La Fontaine n`ont demandé l`aide de l`armée pour étouffer la révolte; ils préfèrent calmer la tension en demeurant impassible. Par contre, cette révolte a des motifs moins noble que les troubles de 1837-1838 et les moyens pris sont disproportionnés quant à la nature du conflit. Il ne s`agit que d`un dédommagement en argent à une population qui est censée être demeurée loyale à la Couronne. Pour exprimer leur désaccord, les Canadiens-anglais brûlent le symbole de la démocratie, la Chambre d`assemblée. Suite à l`incendie du Parlement, les députés se réunissent au marché Bonsecours et s`empressent de voter une adresse visant à protester auprès du gouverneur des agissements des émeutiers. Encore une fois, un échange violent a lieu entre les deux partis en chambre. Une fois l`adresse votée, le scénario se répète pour le gouverneur Elgin qui se fait insulter et dont la force armée a du mal à contenir la foule en colère. Ces incidents ont comme conséquence directe de faire perdre à Montréal son titre de capitale. Après une longue discussion, on décide d`alterner entre Toronto et Québec. De plus, un mouvement annexionniste prit forme parmi canadiens-anglais insatisfaits de l`Union, ironiquement mise en place justement pour écraser les Canadiens français. Yvan Moreau CHAPAIS, Thomas, Cours d`histoire du Canada, Tome VI, 1847-1851, Québec, Librairie Garneau, 1933: 87-121.; DAVID, L. O., L`Union des Deux Canadas, 1841-1867, Montréal, Eusèbe Senécal, 1898: 95-117.; FILTEAU, Gérard, Histoire des Patriotes, Tome III : La prise d`armes et la victoire du nationalisme, Montréal, Éditions modèles, 1938:261-270.
| |