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François Magloire Turcotte (1799-1872)
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[Texte de la conférence prononcée devant la Société d'histoire de l'Île Jésus, le
22 mai 2006 à l'occasion de la Journée nationale des Patriotes par Pierre
Benoît Livernois de la Société Saint Jean Baptiste de Montréal (section
Laval)]
Déconfite par la révolte des treize colonies américaines et menacée d’être
chassée d’Amérique du nord, l’Angleterre adopta une politique plus conciliante
envers les canadiens dans le but de neutraliser les sympathies à la cause des
treize colonies. La constitution de l’acte de Québec de 1774 modéra les ardeurs
des Canadiens à la cause américaine (7) ; les Canadiens était à l’époque une
tribu de paysans laborieux et prolifiques, dirigée par ses prêtres (8). L’église
canadienne, coupée de ses prêtres venus de France, intensifia ses vocations dans
les campagnes dans le but d’augmenter ses effectifs. On assista alors à une
montée très significative des professions libérales, effet secondaire des
vocations sacerdotales. Ces jeunes professionnels ne rompaient pas aisément avec
la mentalité héritée de la société paysanne, de là aussi des contradictions
profondes de pensée et d’attitude. Cette nouvelle élite paysanne paraîtra
réformiste en matière politique et particulièrement conservatrice dans les
domaines économiques et sociaux (6). La constitution de 1791 a eu pour effet de
restituer aux canadiens une véritable patrie dans laquelle ils trouveraient de
puissants appuis à leur nationalisme (9). Cette jeune élite s’initia au
parlementarisme et en peu de temps, elle contrôla la chambre d’assemblée.
L’Angleterre réalisa que dans la déconfiture des colonies américaines, ils
avaient inconsidérément accordé le suffrage universel aux Canadiens et, par ce
fait, les Canadiens cherchaient à exercer un contrôle direct sur ce gouvernement
de la colonie. Pour cette jeune élite paysanne, c’était une période d’exaltation
romantique qui leur fit croire que les Canadiens avaient reçu du parlement
britannique le droit de gouverner seul le Bas Canada. Les revendications des
patriotes servirent de cause à l’Angleterre, qui cherchait un prétexte à changer
cette constitution qui donnait trop de pouvoir aux canadiens. (7)
Le nationalisme
Le nationalisme développé durant cette période était celui d’une véritable
nation, moderne et inclusive; on prend comme exemple les principaux chefs
patriotes, qui n’étaient pas tous des Canadiens. Le premier drapeau canadien
démontrait bien cette ouverture, il avait dans ses couleurs le vert pour
l’Irlande le blanc pour le Canada et le rouge pour l’Angleterre. Après l’acte
d’union en 1840, le cousin de Louis Joseph Papineau, Mgr Lartigue premier évêque
du diocèse de Montréal reprit ce nationalisme nouvellement articulé à son
compte, en le modifiant. Il développa un nationalisme ethnocentriste caractérisé
par la race, la langue et la religion catholique. Ce nationalisme obtus sera
exploité pendant plus de cent ans. Au début des années 50 un petit groupe
d’intellectuels se levèrent et proclamèrent le refus global « À bat la tuque et
le goupillon ». Ce fut le retour à un nationalisme plus inclusif avec la
révolution tranquille des années 60. (7)
L’arrivée
L’épidémie de choléra qui fit rage en 1834 était-il prémonitoire de l’arrivée de
Magloire Turcotte à son premier mandat comme curé (ce prêtre était sur le point
de vivre les cinq années les plus mouvementées de toute sa vie)? Un des grands
traits de caractère du curé Turcotte, de l’opinion du curé Urgel Demers de St
Rose était sa témérité congénitale. Il arrivait à une période où il fallait
remplacer l’église par une nouvelle construction. Mgr Lartigue devenait le
premier évêque du premier diocèse de Montréal et connaissait bien son curé, ne
sombrait pas dans la félicité à voir Turcotte commander le projet de
construction (2).
Le débat
Magloire Turcotte suivait le débat politique de près; son sacerdoce lui imposait
une certaine réserve. Il avait suivi les assemblées de Terrebonne et de St Rose,
ainsi que dans le journal La Minerve et comme Augustin Magloire Blanchet curé de
St Charles, il s’est prononcé en faveur des mesures réformistes (12). Le 26
novembre 1837 la tension politique était à son apogée dans le Bas Canada, le
curé Paquin invita son ancien vicaire Turcotte à souper à St Eustache en
présence du vicaire De sèves pour discuter des événements. Le curé de St Rose
venait à peine d’arriver qu’un loyaliste délirant du nom de Eustache M’Kay
arrivait à bride abattue donner l’alarme pour dire que les patriotes désarmaient
tous les loyalistes et qu’il se préparait à fuir avec ses armes. Le curé
Turcotte, réalisant le climat de panique qui régnait dans les camps de St
Eustache, avait probablement, dans les jours qui suivaient, infiltré les camps
de St Martin ou était campé l’armée anglaise et les loyaux pour mesurer la
progression du conflit (3).
La crise
Le 3 décembre, le soir après les vêpres ,le curé Turcotte bien informé par le
camps de St Martin de ce qui se déroulait sur la rive sud se pressa d’aller
informer le curé Paquin du massacre de St Charles et de la débandade qui régnait
plus au sud . Le curé Paquin devint surexcité en apprenant cette nouvelle
importante, convoqua sur le champ le Dr Chénier espérant provoquer une réaction
par l’annonce de cette nouvelle de la bouche de Turcotte que Chénier connaissait
depuis son passage comme vicaire quelques années auparavant. La réaction fut
foudroyante ; après avoir versé quelques larmes, l’effet opposé se produisit :
plutôt que de se décourager il se cabra et il annonça sa ferme volonté de
combattre jusqu’au bout; c’était, selon les témoins, un spectacle pathétique.
Ses informateurs Ferréol Peletier, Richard Hubert, J B Brien, les frères
Delorimier, Girod et les autres avaient informé Chénier du contraire, mais les
larmes que Chénier avait versées au presbytère en disaient long sur son
évaluation de la situation (3).
La veille
Le 10 décembre, quatre jours avant l’attaque, le curé Turcotte revint
visiter le curé Paquin qui était au garde à vue dans le camp avec le vicaire De
sèves, prisonnier des patriotes. Turcotte informa le curé Paquin que le camp de
St Martin grossit et qu’il s’y faisait de grands préparatifs tout annonçait
qu’on allait bientôt attaquer. Le même soir, le curé Paquin observa le curé
Turcotte traverser la garde, sans être ennuyé d’aucune façon grâce à des
laissez-passer signés par de très influents chefs patriotes (4)
(On voit ici tout le paradoxe de l’homme qui avait un pied dans chaque camps et
personne ne semblait inquiété de ses manèges)
L’alerte
Un soleil radieux se levait par ce froid matin du 14 décembre 1837. Rien
dans l’entourage de ce paisible village n’augurait le drame qui allait se
produire, à part la nervosité du curé Paquin. Après tout, on s’attendait à une
opération policière visant à arrêter des chefs patriotes qui avaient leurs têtes
mises à prix. Le curé Paquin et le vicaire De Sève se trouvaient au village
lorsque l’alarme fut donnée; quand ils aperçurent à une assez grande distance,
le long du chemin de la grande côte, les milliers de baïonnettes qui brillaient
au soleil, ils ont embarqué dans leur voiture pour retourner à la ferme où il
s’étaient réfugiés. Sur le chemin du retour, nos deux compères se mirent à
chanter sur un air de carâ :
Coco, prend ta lunette ne vois tu pas dit moi
L`orage qui s’apprête et qui gronde sur toi
Abandonnons Paris et gagnons du pays
Mettons notre ménage à l’abri de l’orage
Coco, coco sauvons nous au plus tôt
Ceci parait presque incroyable--c’est le curé
Paquin lui même qui se raconte et ajoute ce passage a son récit. Nos deux
compères étaient-t-ils en train de craquer? L’échec des négociations avec
Chénier avait-elle affecté la santé mentale du curé? (3)
La bataille
L’apparition du curé Turcotte au beau milieu du champ de bataille reste un
mystère .Le curé Paquin dans son récit dit que le curé Turcotte avait suivi
l’armée. C’est fort probable, il aurait pu être averti à St Rose du passage de
l’armée anglaise par un paroissien de l’ouest de la grande côte St Rose ou de la
petite côte et partir à l’improviste suivre les traces encore fraîches que
l’armée de 2000 soldats aurait pu y laisser, mais le plus déroutant dans cette
histoire: comment aurait-il pu traverser les lignes hermétiques que l’armée
avait établie? N’oublions pas qu’à cette époque, l’armée anglaise était le corps
militaire le plus puissant au monde et que le général Colborne qui la dirigeait
était un vétéran de plusieurs grandes campagnes militaires européennes dont
Waterloo. Malgré tout, aussi incroyablement, on retrouve notre curé au beau
milieu du champ de bataille sur la glace de la rivière, transformée en cible,
les balles et les boulets de canon sifflant autour de lui, les miliciens loyaux
sur la rive sud et dans les îles environnantes qui tiraient dans un sens et
l’armée anglaise sur la rive nord qui tirait dans l’autre sens, un véritable feu
croisé. Miraculeusement, il vogua d’un moribond à l’autre en administrant les
derniers sacrements et réconfortant les pauvres malheureux patriotes et cela
aussi longtemps que sa présence fut requise (par défaut il était devenu
l’aumônier des patriotes). Le curé Turcotte demeura à St Eustache jusqu’au
lendemain réconfortant les prisonniers et les blessés. À travers toute cette
adversité Turcotte s’était comporté en véritable héros de guerre (3).
La fuite
À la suite du massacre de St Eustache Magloire Turcotte, se croyant en danger,
traversa au Vermont, ou il se retrouva en compagnie de J.B Brien, que Turcotte
connaissait comme médecin stagiaire chez le docteur Smallwood de St Martin.
Middlebury, Vermont fut le lieu de la conférence idéologique la plus importante
jamais tenu par les patriotes le 2 janvier 1838. L’idéologie du nationalisme de
Papineau, qui n’avait jamais été discutée, fut critiquée par les partisans de
Nelson à travers la nouvelle idéologie d’un Canada souverain. On reprochait à
Papineau d’être contre l’abolition du régime seigneurial, parce qu’il était
lui-même seigneur, aussi veut on abolir les écoles confessionnelles et séparé
l’église de l’état. Papineau chez qui le désir de réforme constitutionnel a
toujours été tempéré par un conservatisme socio économique, quitta la réunion
pour se diriger vers Albany, laissant Robert Nelson à la tête des patriotes.
(Des recherches sur cette période complèteraient le dossier). Durham décréta une
amnistie aux patriotes de 1837 en arrivant à son poste. Il est possible que les
idées de Nelson ne plaisent pas à Turcotte parce que suite à cette amnistie
Turcotte fut de retour à St Rose peu de temps après. L. O David dit que Turcotte
est revenu de l’étranger hanté par une date, il déclencha un vrai délire
paranoïde autour de cette date; aux patriotes il exprima sa hâte d’en finir, et
aux bureaucrates, il prédit un vrai massacre (4). Toute la stratégie de la
deuxième insurrection devait se déroulée dans la plus grande discrétion; c’est
pourquoi on avait formé les Frères chasseurs, société secrète, et Turcotte,
probablement à cause du traumatisme vécu à la bataille de St Eustache, n’était
plus capable de se contenir. À nouveau, il se senti menacé et quitta St Rose et
retraversa la frontière (9). Après les évènements de 1838, il fut arrêté au nom
du roi d’Angleterre pour haute trahison le 10 décembre 1838 et fut emprisonné de
décembre 1838 à avril 1839. Son arrestation démontre bien que sa conduite durant
les évènements était plus le fruit de son tempérament que de ses intérêts, le
notaire Césaire Germain de St Vincent Paul, collaborateur reconnu, lui ne fut
pas arrêté (5). Turcotte a quitté au mois d’avril, mais l’archevêque avait
attendu une année avant de le remplacer et au moi de mai 1839, on le remplaça à
la cure de St Rose (2). Après son incarcération, il fut obligé de se retirer du
ministère actif pendant deux ans à Joliette.
Le purgatoire
On retrouvera quelque temps après notre ex curé de St Rose le long de la côte
atlantique comme premier curé résident de la charmante petite paroisse de
Gédaïque à l’époque des Zarzais (Nom donné au gens de l’île Jersey par les
Gaspésiens) qui tenaient les gens du golfe St Laurent économiquement captifs
avec leur économie de troc. Quand Turcotte arriva, cette paroisse était au
milieu d’une guerre intestine avec son ancien curé visiteur devenu grand
vicaire. Le grand vicaire Antoine Gagnon s’ingéra dans les affaires du nouveau
curé Turcotte qui défendait bien sa cure, Gagnon se frottait à un vétéran qui
n’était pas un peureux. Le grand vicaire voyant la ténacité de Turcotte le fit
relevé de sa cure .Les paroissiens de Grand-Digue en signe de solidarité envers
leur curé se révoltèrent et barricadèrent l’église et le presbytère, pour
éloigner le grand vicaire de la paroisse et pour couronner la révolte un groupes
de paroissiens abandonnèrent Grand-Digue pour suivre Turcotte au Québec. Il aura
été curé à Grand-Digue de 1845 à 48, selon Mr Paul Pierre Bourgeois qui écrit
dans une monographie de Grand-Digue que la période la plus intense que
Grand-Digue a vécu était la période de cette révolte (10).
L’injustice
De retour, il subit injustement le même sort que l’abbé Chiniquy, le grand
tribun de la tempérance, qui fut exilé au États-Unis par Mgr Ignace Bourget pour
des raisons de disciplines. On le retrouvera à Troy dans l’état de New York près
de Albany , de 1852 à 60; après ce purgatoire, on le retourna aux Acadiens qui
l’aimait bien, mais cette foi à l’île du Prince Edouard pour un bref séjour 1860
à 61. Il revient au Québec pour devenir le troisième curé de St Gabriel de
Brandon de 1861 à 64, retourne au Etats-Unis pour devenir le curé fondateur de
St Joseph de Springfield dans le Massachusetts de 1869 a juillet 1870 et
finalement va mourir le 17 janvier 1872 a St Edwige de Clifton, près de
Coaticook, (11 et14). Une grande caractéristique du curé Turcotte était sa voix;
Gédéon Ouimet, ancien premier ministre du Québec, qui avait connu Turcotte dans
son enfance à St Rose, avait retenu la mélodie de sa voix
Conclusion
L’histoire de François Magloire Turcotte est passionnante à travers ses
intrigues, mais laisse la mémoire de Turcotte dans le doute à cause de son
ambivalence. On ne peut que faire le parallèle avec une histoire contemporaine
similaire qu’est celle de Claude Morin, principal conseiller de René Lévesque,
qui pour des raisons similaires d’ambivalence a eu les mêmes problèmes. Le vieil
adage qui dit: « Trop de zèle, trois quart de bêtises » est-il l’héritage de ce
curé de village (5)? Finalement l’opération policière qui visait à mettre sous
arrêt les chefs patriotes, servira de paravent à une opération punitive
militaire bien orchestrée dans le but d’épouvanter les populations civiles.
Néanmoins la bravoure et la détermination du docteur Chénier et ses hommes
laisseront une empreinte historique qui marque encore notre histoire
contemporaine. Une défaite après une héroïque résistance a en soi une valeur
spirituelle qui rend possible des redressements futurs. (13)
Épilogue
John Fraser, le volontaire loyaliste qui s’est opposé par la politique et
par les armes aux patriotes de 1837-38, tombera d’accord avec Thomas Storrow
Brown .En 1890, dans un accès de ferveur à l’égard de ses anciens adversaires,
il déclare : `` Les germes semés au pays par la rébellion ont donné naissance à
la formidable structure, élevée sur les ruines de la république visionnaire des
patriotes ``. (12) Notre petit Anglais était entrain de constaté que les idées
réformiste des patriotes était contemporaine, et paradoxalement avec le haut
taux de fertilité des Canadiens de l`époque la formidable structure s`élevait
La généalogie
François Magloire Turcot est né le 24 octobre, 1799, la veille du XIXe
siècle, à Baie St- Paul. Il était le fils de François Turcot et de Charlotte
Fortin. Fit ses études au séminaire de St Hyacinthe. Son ordination par Mgr
Lartigue eu lieu le 19 septembre, 1829 dans l`église St Jacques de
Montréal;vicaire à St Cyprien de Napierville ,1830; à Gentilly ,1831; à St
Eustache ,1832; à St Hyacinthe,1833;curé de St Rose ,1833-38;retiré à Joliette
1838-40; curé de St Jacques le Mineur 1840-41;curé de St Paul et St Thomas de
Joliette 1841-42 ;missionnaire de la Congrégation canadienne ,1842-45;curé de
Grand-Digue, 1845-48;curé des Canadiens de Troy dans l’état de New York,1852-60;
missionnaire à l’île du Prince Édouard,1860-61 ; troisième curé de St Gabriel de
Brandon,1861-64; curé- fondateur de St Joseph de Springfield 1869-70. Il est
mort le 17 janvier, 1872 à Sainte-Hedwdige-de-Clifton, près de Sherbrooke. Son
corps repose à Montréal (1)
(1) Répertoire général du clergé Canadiens
(Cyprien Tanguay Imprimeur Eusèbe Senécal)
(2) Abbé Urgel Demers (Histoire de ST Rose 1947 Arbour et Dupont) Photo page 320
(3) Journal Historique par un témoin oculaire écrit par le curé Paquin (Jonh
Jones 1838)
(4) Histoire des patriotes 1837 -38 (L O David 1866 Eusèbe Senécal)
(5) Magloire Turcotte, traite ou patriote (Pierre Benoît Livernois2006)
(6) Fernand Ouellet, Histoire économique et sociale du Bas Canada
(édition université Ottawa 1966)
(7) Les Canadiens après la conquête (Michel Brunet histoire et document 1964)
(8) Le Canada français (Raoul Blanchard Fayard 1960)
(9) Les patriotes 1837-38(Filteau)
(10) Monographie historique d’une paroisse Acadienne (Paul Pierre Bourgeois
publication Grand Digue 1988)
(11) Le diocèse de Montréal a la fin du dix-neuvième siècle (Eusèbe Senécal
1900)
(12) Les habits rouges et les patriotes (Elinor Kyte Senior VLB 1997)
(13) François Albert Angers (patriotisme et raison Action Nationale 1958)
(14) Dictionnaire Biographique du clergé canadien-français (abbé J.-B.-A.-
Allaire imprimeri sourds-muets 1910)
(15) Conférence sur le curé Turcotte la journée Nationale des Patriotes le lundi
22 mai 2006 à la société d’Histoire et de Généalogie de l’île Jésus
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