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Ma chère Maman, ma bonne amie C'est aujourd'hui un bon jour puisque j'ai une lettre de toi qui ne contient rien que de bon & d'agréable sur ta santé & ceux des enfans. J'espère que c'a continuera. Je suppose que tu te fies sur ton isolement pour ne pas craindre la picotte puisque tu ne prends aucune précaution contre ce fléau. l'Excessive sévérité de la saison est peut être une raison pour laquelle tu ne crois pas pouvoir faire vacciner les enfans durant ce mois; dès que les circonstance te le permettront, je te prie d'avoir recours à cette précaution, non à l'inoculation. En vérité il y a de quoi enlaidir en peu de tems Montréal, si tout à tour nos jolies femmes se trouvent attaquées de la picotte. M(es) Pothier, Bingham, Bleury aussi me dit-on, menaçées de perdre plus que la vie, leur jolis minois. S'il ne fallait qu'une procession pour les guérir, je la ferais de grand 279 coeur -- Si elles sont marquées sera-ce en punition de leurs propres péchés, ou des tentations qu'elles auront excitées. Je le donne aux casuistes à deviner. Le petit Lactance aura-t-il souffert du froid dans ses courses à l'école? quand les autres seront vaccinés qu'il le soit aussi. J'hésiterais à interrompre le cours d'étude d'Amédée à moins qu'il n'y eut quelque cas de picotte au collège ce que tu apprendrais de bonne heure par Madame Coursol à qui tu feras mes civilités et à M(lle) Quesnel; leur disant que leur frère est bien, que nous vivons en famille, que cela rend moins insupportable l'absence de chez soi, et que je les prie de voir souvent ou de tems à autres Amédée et Dessaulles quand elles vont au Collège, et d'en parler quand elles écrivent à leur frère. J'ai reçu ce matin une lettre de Théophile je l'en remercie, il me donne des détails sur la santé de mon chez père dont j'étais inquiet et sur les chicanes que me font les voisins à raison du mauvais étât de deux petites maisons. Il sait bien que je n'en retire rien du tout depuis deux ou trois ans que je ne les ai pas ouvertes aux locataires qui sont des inconnus qui y sont entrés d'eux-mêmes. Qu'il n'y a rien de mieux à faire que de les faire sortir et de tenir les maisons fermées. Comme je n'ai pas le tems de lui écrire communique lui ma lettre et lui fais mes amitiés et remerçimens. Le beau Montréaliste est arrivé avant hier il devait venir en janvier. Son retard présageait-il une infidélité ? Repugne-t-il à faire le sot, le sault ? Bien d'autres avant lui après s'être longtems défendu, finissent par se rendre. Il n'y avait et n'y a pas d'engagement de pris--mais d'un moment à l'autre il peut y en avoir et quand j'en saurais quelque chose je te le manderai. Le Beau Papillon tourne autour du flambeau. L'on a vraiment pas un éloignement absolu et décidé contre lui. J'allais diner en campagne hier chez M(r) Daly, sans quoi j'aurais été faire la veillée avec cette jeunesse et la surveiller. Que les débats t'intéressent, c'est bien naturel, mais qu'en disent dans le public les amis et les ennemis des Canadiens. C'est une question à laquelle M(tre) Théophile donnera son attention et sa réponse irréfragable. Je ne me permets pas le doute ni l'hésitation quand le sage docteur aura parlé. Tu as peut être tort de ne pas te rendre aux invitations qui te sont faites d'aller en société. Comment pourras tu réunir chez toi tes amis dans quelques occasions ou tu désireras les avoir, où il serait convenable que tu les eusses, si tu ne les vois pas quand ils te désirent ?... Adieu chère amie, aies soins de toi & des nôtres-- Respects à ta maman, à mon père. Amitiés à tous les amis embrassemens à tous les enfans. Ton bon ami et bon époux.
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