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Les Patriotes de 1837@1838 - Une société secrète vouée à l'indépendance du Québec
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Une société secrète vouée à l'indépendance du Québec
Article diffusé depuis le 31 mars 2013
 




Un titre qui fera sourire mais qui démontre tout l’absurde de la situation où les militants souverainistes se trouvent aujourd’hui plongés. Même si l’option souverainiste rassemble toujours la moitié des francophones du Québec, celle-ci est discréditée et combattue au point où il faudrait peut-être penser se doter d’une organisation secrète dont la seule visée consisterait à accéder à l’indépendance dans les meilleurs délais.

Le souverainisme québécois fait aujourd’hui face à trois défis sans précédents.  
Primo, jamais depuis le début des années 1960 l’option souverainiste n’a été aussi systématiquement démonisée.  Des médias de masse, notamment au sein du groupe Gesca et du journal La Presse, combattent systématiquement toute forme d’expression de fierté nationale aux seules fins d’éradiquer le mouvement souverainiste.  Les souverainistes ont beau être des millions, des chroniqueurs populistes ne se gênent pas pour distiller leur haine morbide envers les « séparatisses », « péquisses », « nationaleux » ou quiconque défend un État québécois fort et susceptible de renforcer l’identité nationale.  Ces discours ont à ce point acquis droit de citer que plusieurs souverainistes se sentent désormais ostracisés et honteux d’afficher leurs convictions, au point d’y renoncer.

Secondo,  le mouvement souverainiste est aujourd’hui victime de sa foi trempée envers la démocratie et les débats publics sur ses stratégies. Diverses tendances et courants de pensée se disputent donc à qui mieux mieux sur la place publique, donnant l’impression d’un mouvement chicanier et morcelé, au grand plaisir de ses adversaires. Même l’élection à Québec d’un gouvernement souverainiste n’a pas suffit pour rallier ces tendances autour d’une stratégie commune.  Ces déchirements sur la place publique démontrent l’échec d’une démarche purement démocratique menée à coup de manifs, de pétitions, de consultations et de « débats internes » par médias interposés.

Tertio, tandis que le mouvement souverainiste demeure rivé à une démarche démocratique et à une « stratégie ouverte », en face, du côté fédéraliste, s’activent depuis trente ans des organisations très structurées, très bien financées et fort peu démocratiques, dont la mission essentielle consiste à infiltrer les lieux de pouvoir afin d’extirper le sentiment d’appartenance au Québec.  La commission Gomery sur le scandale des commandites n’a dévoilé qu’en partie l’ampleur de ces organisations.

Le mouvement souverainiste apparait donc discrédité dans les grands médias, divisé sur la place publique et miné par des organisations fédéralistes très bien structurées. Or quand une telle situation s’est présentée à travers l’histoire du Québec, les nationalistes ont alors vu l’utilité de se doter d’organisations secrètes pour se mettre à l’abri des attaques adverses et arriver à mettre en œuvre une stratégie cohérente, systématique et bien ciblée.

Des Frères chasseurs à la « Patente »

L’histoire du Québec offre quelques exemples de telles organisations qui ont pu, à leur époque, infléchir sur le cours des événements.  En 1838, le mouvement patriote constate qu’il est désormais infiltré par des dizaines d’espions et d’agitateurs.  L’armée anglaise et la police de Montréal n’ont alors aucun mal à connaitre à l’avance les plans échafaudés par les Patriotes exilés aux États-Unis, notamment lors de l’incursion de Caldwell Manor, en février 1838.   Robert Nelson, Cyrille Côté et Lucien Gagnon ont donc l’idée de créer une organisation clandestine destinée à planifier dans le plus grand secret un soulèvement général du Bas-Canada.  Durant tout l’été de 1838 on assermente ainsi des dizaines de milliers de Patriotes au sein de l’Association des Frères chasseurs.  L’Association reprend la plupart des caractéristiques d’une société secrète : serment sacré consistant à garder le secret sur l’organisation et sa mission, en l’occurrence libérer le Québec de la tutelle anglaise.  Chaque membre ignorait en outre qui d’autre faisait partie de l’organisation à l’exception des principaux chefs qui seuls connaissaient bien son fonctionnement.  Au sommet de l’organisation des Frères chasseurs, on retrouvaient les « Grands aigles », suivis des « Castors », des « Raquettes » et enfin des « Chasseurs » ou simples membres. Malgré ses lacunes logistiques, l’Association des Frères chasseurs a permis que le plan de campagne des Patriotes ne soit pas connu des autorités britanniques.

Au début du XXe siècle, les Francophones de l’Ontario et de l’Outaouais québécois sont victimes de discrimination et même d’intimidation.  C’est dans ce contexte que des membres de l’élite professionnelle et cléricale créent en 1926 une association patriotique secrète vouée à la défense du français.  L’Ordre Jacques-Cartier connait bientôt un succès remarquable, regroupant jusqu’à 40 000 membres, réunis dans divers comités régionaux à travers tout le Québec.  La stratégie de l’OJC consistait à rejoindre les Francophones influents dans divers milieux, trop isolés cependant pour arriver à dénoncer le sort réservé aux Francophones tant leurs adversaires étaient puissants, organisés et malveillants.  L’OJC choisit donc de coordonner l’action de ses membres pour qu’ils agissent de façon concertée, mais sans s’exposer à perdre leur emploi ou à subir des représailles.  Afin d’assurer le secret absolu sur leurs campagnes, les membres de l’OJC se réunissaient sous différentes appellations pour ne pas éveiller de soupçon.  La plus célèbre étant bien sûr « la Patente »,  formule évasive s’il en est.

Pendant quarante ans, l’Ordre Jacques-Cartier, ou « la Patente », a joué un rôle inestimable dans la promotion du français et contre la discrimination faite aux Francophones, tant en Ontario qu’au Québec.  Parmi ses campagnes couronnées de succès, mentionnons le bilinguisme sur la monnaie canadienne et les formulaires d’assurance-chômage, des services en Français dans les compagnies d’utilité publique telle que Bell Canada ou l’ouverture de l’hôpital Montfort à Ottawa en 1953. L’OJC  a aussi engagé la campagne « d’achat chez nous » qui allait permettre à de nombreux commerçants de survivre durant la crise des années 1930.

Une société secrète à l’heure du web 2.0

En fin de compte, la situation où se trouvent plongés les souverainistes en 2013 ressemble beaucoup à celle vécue par les francophones au siècle dernier ou même par les Patriotes en 1838.  Sans bien sûr renoncer à la voie démocratique, la seule légitime afin de parvenir à l’indépendance, il est temps qu’une organisation plus « discrète » soit mise sur pied afin d’agir de manière ciblée, concertée et stratégique. Une telle organisation devrait réunir des décideurs de tous les milieux, gens d’affaires, chefs syndicaux, du communautaire, ainsi que des fonctionnaires, tant fédéraux que provinciaux, mais d’abord liés par l’intime conviction que le Québec doit au plus tôt devenir un pays.

À l’heure des nouveaux médias, une telle organisation aura bien sûr peu à voir avec ses folkloriques prédécesseurs.  Certaines règles sont cependant immuables. D’abord, que personne ne connaisse qui fait partie de l’organisation à part ceux partageant sa section locale.  Ensuite, l’organisation doit être en mesure d’assurer à ses membres que jamais leur affiliation ne sera divulguée, que tous doivent accepter que la seule fin de l’organisation est d’accomplir l’indépendance du Québec et, enfin, que ses mots d’ordre sont sans appel.
Tandis que se mène la « chasse aux séparatisses »,  ces règles étonnantes sont malheureusement devenues nécessaires. Depuis 1970 le gouvernement du Canada et les organisations fédéralistes ont investis des centaines de millions aux seuls fins d’écraser le mouvement souverainiste québécois.  Les services secrets canadiens, la GRC, le Conseil pour l’unité canadienne de même que des fondations privées ont allègrement contournés les lois afin de manipuler l’opinion ou infiltrer les organisations souverainistes. Pourtant, les médias, le grand public et les souverainistes eux-mêmes sont demeurés plutôt indifférents devant ces atteintes frontales au droit à l’autodétermination des Québécois. Gageons cependant qu’à la suite de ce modeste article il s’en trouvera pour crier au « complot séparatisse ».

La seule action au sein de partis politiques démocratiques est devenue insuffisante pour parvenir à la souveraineté.  Faute de le comprendre, les souverainistes québécois devront accepter le déclin inéluctable de leur capacité à un jour faire du Québec un pays indépendant.

 

Recherche parmi 16 491 individus impliqués dans les rébellions de 1837-1838.

 



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